Les cimetières au moyen âge
et à l'époque classique

Pendant la plus grande partie du moyen âge (et des siècles qui ont suivi), les tombes n'avaient pas de caractère permanent, sauf exceptions. Les défunts étaient enterrés dans le cimetière de la paroisse. On oubliait bien vite l'endroit où se trouvait la tombe car il n'y avait as de monument funéraire. Il suffisait de savoir que l'aïeul était là. C'est qu'on avait encore besoin de lui ! On pensait qu'il pouvait servir d'intercesseur auprès du très Haut pour faire pardonner les turpitudes de la vie d'ici bas. Le corps était mis à décomposer en terre. Quelques années après, il fallait faire place aux nouveaux décédés. On exhumait les squelettes et on entassait les os dans des fosses communes ou dans des ossuaires.
Les cimetières étaient très exigus. Ils occupaient le peu d'espace entre les églises et les maisons. Ils n'avaient souvent que deux à quatre mètres de largeur.. On marchait littéralement sur les tombes, dans une insoutenable puanteur.

Seul les personnages important avait le droit au monument funéraire. Ces monuments prenaient place dans la cathédrale et dans les églises. C'étaient tout d'abord les dignitaires de l'église. Ils avaient le droit de gésir dans la crypte de la cathédrale (à la période romane) ou dans le chapelle de la Vierge (en particulier pour les évêques et archevêques) Le déambulatoire était lui aussi prisé. Il en était de même pour les desservants des églises paroissiales et leurs patrons. On posa sur les tombes des plaques gravées (dalles tumulaires). On construisit des statues (les gisants), voire de vrais monuments.

              

 

Chaque église était entourée d'un cimetière. Il n'était pas question de laisser les ancêtres quitter l'ombre du clocher.
ces cimetières avaient des dimensions qui pouvaient varier considérablement. Quelques mètres de largeur pour les plus petites et jusqu'à des dizaines de mètres pour les plus grandes.
Le terme utilisé le plus communément est celui d'Aitre. Le mot vient d'Atrium, qui désignait la cour intérieure des maisons romaines. A la fin de l'époque romaine on ne construisait plus de cours intérieures, mais des églises. Peu à peu le terme d'Atrium, transformé en Aitre, est devenu synonyme de cimetière.
Presque toutes les églises avaient leur aitre. la cathédrale, aussi (l'Aitre Notre-Dame).


Aitre Saint-Godard, Saint-Laurent



Aitre Saint-Vivien


Aitre Saint-Nicaise

 

Le cimetière Saint-Maur

A la différence des autres cimetières, ce cimetière n'était pas paroissial. Il était le cimetière de l'Hôtel-Dieu. On y enterrait les malades de l'établissement. Il servait également à ensevelir les victimes des épidémies, en particulier de la peste.
Il comportait trois chapelles, en particulier la chapelle des trépassés dont des vitraux ont été remontés dans l'église Saint-Romain.
Il a continué à être utilisé au XIXe siècle.

 

L'Aitre Saint-Maclou

Le plus connu de ces aitres, est l'Aitre Saint-Maclou. C'était le cimetière de la paroisse la plus peuplée de la ville.
Il y avait autour de l'église Saint-Maclou un cimetière qui ne se distinguait pas des autres cimetières paroissiaux de la ville. Mais ce cimetière s'est trouvé complètement saturé après la terrible peste noire qui avait sévi entre 1348 et 1349. On pense que près de la moitié des habitants de l'Europe en ont été victimes. Les conséquences furent considérables, dans tous les domaines. Au niveau matériel, les cimetières se trouvèrent saturés. C'est ce qui advint au vieil Aitre. On décida, tout en le conservant, de créer un nouveau lieu de sépulture.

On acheta au nord de la rue Martainville, dans la rue du Chaudron (actuellement rue Géricault) un terrain à cet usage. On y accédait par une porte au nord. Mais les épidémies se sont poursuivies et le nouveau cimetière fut souvent saturé. On achetait alors quelque pièce de terre à l'est ou au sud et le cimetière s'agrandissait.
Au début du XVIe siècle, il avait atteint les dimensions de l'aitre actuel. Une nouvelle épidémie survint en 1519-1520. Il 'était plus question d'agrandir car il n'y avait plus d'espace de libre. Vers 1525, on décida alors la construction du monument actuel.
A l'origine, il n'y avait que trois côtés (ouest, nord et est). Il n'y avait ni portes, ni fenêtres. le toit était plus bas, au niveau de l'appui des fenêtres de l'étage et était percé de fenêtres mansardées.

On inhumait dans la cour et on déposait les ossements découverts en creusant les fosses dans l'étage des galeries. La décoration est en rapport avec les pratiques funéraires. Les poutres sont décorées à profusion d'ossements ou d'objets ayant rapport avec la mort et les pratiques d'inhumation.
L'Aitre a servi de cimetière jusqu'à la fin du XVIIIe siècle. Un édit royal du 19 novembre 1776 décida de la suppression de tous les cimetières dans les villes. Il fallut attendre un arrêt du Parlement du 7 août 1780 pour que le cimetière de Saint-Maclou déménagea au pied de la Côte Sainte-Catherine.

Au milieu du XVIIe siècle, on avait construit une aile sud. Elle abrita rapidement une école pour les pauvres du quartier et en particulier pour les filles. Les deux fonctions cohabitèrent pendant plus d'un siècle.
Lorsque le cimetière déménagea, l'ensemble des locaux fut converti en école. On suréleva le toit, on mit des panneaux, des portes et des fenêtres dans les trois galeries d'origine.
Hors la période révolutionnaire, les écoles se succédèrent jusque dans les années 1920. On ne savait que faire du monuments. On envisagea diverses chose (en particulier de le transformer en garage). Il fut exproprié par la Ville de Rouen pour y installer un musée d'art normand. Ce projet ne put aboutir.
En 1940, l'Ecole des beaux-arts ayant été incendiée, on décida de l'installer dans l'Aitre. Elle y est toujours !

 
Retour
© Copyright Jacques Tanguy 2012