Cathédrale - Chap. du Grd-St-Romain
Vitrail du Panégyrique de Saint-Romain
|
Il permettait, tous les ans, de libérer un condamné à mort détenu dans
les prisons de la ville, en souvenir du condamné à mort qui avait accepté
d'accompagner Saint-Romain dans sa lutte contre la Gargouille.
Ce privilège n'est pas isolé. par exemple, les évêques d'Orléans avaient celui de
libérer les condamnés des prisons de la ville, mais seulement les jours de
leur première entrée.
Il passait pour avoir été donné à Saint-Ouen par Dagobert (mais il
était mort lorsque celui-ci monta sur le trône épiscopal...) ou par
Clovis II (vitraux de la Cathédrale et de l'église Saint-Romain).
La première mention du privilège de Saint-Romain ne remonte qu'en 1210. A
cette date, le gouverneur du Château de Rouen refuse de libérer le prisonnier
élu. Suite à la plainte des chanoines de la Cathédrale, le roi
Philippe-Auguste envoie des enquêteurs. Ils font comparaître neuf témoins qui
attestent que l'exercice du privilège était effectif à l'époque des
Plantagenets Henri II et Richard-Coeur-de-Lion. Si on en croit cette enquête,
il pourrait donc être apparu au début du XIIe siècle. Il est difficile de le
faire remonter plus loin : les vies de saints, les textes comme les
représentations antérieures au XVe siècles ne figurent pas cet épisode dans
la longue liste des miracles opérés par le saint.
Tout au long de son histoire, le privilège a été contesté. Il a été
l'objet d'un âpre combat mené par le chapitre pour le faire confirmer par les
souverains.
C'est qu'il était une entorse grave à un principe absolu : le caractère
régalien (royal) du droit de grâce. Les agents de l'Etat, représentants des
corps constitués comme le parlement ou la Cour des Aydes, Baillis etc... ne
pouvaient que s'élever contre lui et mener une guerre de procédure.
Son histoire tourmentée est ponctuée d'incidents, de luttes allant quelquefois
jusqu'à l'émeute. Parfois servant les souverains (un neveu de Diane de
Poitiers en a bénéficié à la demande du souverain, de la favorite et de tout
ce que la cours comptait d'hommes important), parfois leur faisant de l'ombrage
(comme lors de l'élection du sire de Croisset pourtant interdite par François
Ier), elle était aussi un moyen pour le chapitre d'affirmer l'étendue de ses
pouvoirs. D'où aussi une certaine surenchère, les chanoines élisant le
personnage le plus horrible, le plus noir.
Ces abus amenèrent les souverains à placer quelques bornes à son exercice.
Henri IV exclut du bénéfice du privilège certains crimes (lèse-majesté,
hérésie, fausse monnaie, assassinat par guet-apens, viol).
En 1790, pour la dernière fois, le chapitre exerça son privilège. En 1791, le
ministre Duport, consulté, déclara que "(le) privilège est donc du
nombre de ces droits dont la suppression est une suite non moins immédiate
qu'évidente de nos nouvelles lois". c'en était fini.
En près de sept siècle, le privilège avait permis de libérer au moins 15
voleurs, 6 violeurs, 9 infanticides, 3 faux monnayeurs et plus de 350 assassins.
La scène de l'obtention du privilège est souvent représentée sur les
vitraux. Il faut voir dans cette insistance, la tentative du chapitre de
justifier par là un privilège par ailleurs fort contesté.
|